Made with racontr.com
alt

Interview

"Que cette différence de culture

devienne une richesse"

___________________________

Sabou M'Bengue, médiatrice interculturelle au sein de l'Association Femmes Relais Sarthe

Sabou M'Bengue, médiatrice interculturelle au sein de l'association Femmes Relais Sarthe, et ancienne présidente de Sablons en fête était l'invité de France Bleu Maine.

Elle répond aux questions de Ruddy Guilmain et Sophie Jouanneau.

Q :  On a coutume de dire au Mans que c'est un quartier sensible, est-ce le cas ?

Quartier sensible peut-être maintenant, mais c'est quand même un quartier qui est assez riche. Moi j'y habite depuis 34 ans, j'y ai élevé mes enfant, j'y ai travaillé, j'y travaille encore, pour moi c'est un quartier riche avant tout. Après le reste, c'est à nous de travailler pour essayer de l'améliorer.


Q: Qu'est-ce que vous  y avez trouvé pour ne jamais en partir depuis 1981 ?

Une solidarité, un bon acceuil parce que les gens qui sont arrivés avant nous nous ont bien accueillis, nous ont guidés. On a eu des échanges malgré les différences de culture. Quand on se déplace, quand on part en exil, retrouver cette chaleur, ce lien ça pousse à rester.


Q: Aujourd'hui, vous-même, au sein de l'association Femmes Relais Sarthe, vous guidez ceux qui arrivent, fraichement débarqués. De quelle manière ?

Ca nous rappelle nous quand nous sommes arrrivés, avec toutes les démarches administrativces qu'on ne connaissait pas chez nous. On a commencé avec des femmes qui nous ont aidés au départ, pour le regroupement familial, faire les démarches, les papiers, la régularisation, les accès aux droits. C'est dans ce sens-là qu'on les aide, dans les actes de la vie quotidienne.












Q: Ca fait plus de 10 ans que vous accompagnez ces populations qui arrivent en France, aux Sablons, quelle évolutin vous constatez ? L'origine des gens a changé ?

Oui, ça a beaucoup changé, parce qu'au départ c'était des arrivées par regroupement familial. Aujourd'hui, les gens arrivent parce que souvent chez eux, il y a des guerres, des crises. 


Q:  On a vu arriver des gens de Tchétchénie, de Syrie... Ils sont nombreux ?

Oui, ils sont nombreux, ça arrive encore. Ces personnes-là sont tellement traumatisées, qu'il faut travailler d'une autre manière, c'est-à-dire qu'il faut les rassurer, il faut leur faire comprendre que là on est dans un pays quand même où il n'y a pas de conflit. Ils ont juste des démarches à faire et après ils sont tranquilles. Des psychologues vont les aider à gérer les difficultés psychologiques qu'ils ont.

Q : Vous les guidez pour leurs droits, vous les éclairez aussi sur les devoirs ?

Oui, l'accès aux droit, c'est important, les devoirs aussi, avec le respect des lois du pays d'accueil, des contextes. Dans notre association on travaille beaucoup sur la citoyenneté, sur les us et coutumes du pays d'accueil, afin d'améliorer le mieux vivre ensemble.


Q: Vous parliez de la solidarité, que vous avez trouvé dans ce quartier à votre arrivée,  aujourd'hui on dit beaucoup aux Sablons que les communautés ont tendance à rester entre elles, qu'il y a moins d'échanges qu'avant, est-ce la réalité ?


C'est quelque chose que l'on remarque de plus en plus, parce qu'il y a la crise, les gens sont dans une certaine précarité, le seul moyen qu'ils trouvent c'est de se replier sur eux mêmes, de se replier sur leur communauté. Donc on essaye de faire en sorte que cette différence de culture devienne une richesse, que les gens puissent échanger.

Q : Est ce qu'il y a une communauté musulmane ?

Oui, ça se voit de plus en plus. Les jeunes qui sont desoeuvrés, qui ne savent pas quoi faire, souvent se replient dans la religion. Est ce que c'est un bien ?  Je ne sais pas...










Q: En 34 ans, vous avez pu constater l'image que les Manceaux ont du quartier... cette image est plutôt positive ou négative ? 

Elle était très négative un moment donné, il y a encore des gens qui maintiennent ça. D'autres viennent voir le quartier avec le tram, donc il y a une ouverture vers l'extérieure qui se fait. Ils voient qu'il y a autre chose que la délinquance aux Sablons. Il y a des talents, des gens qui font des choses magnifiques. Mais comme on dit, cette diversité tellement riche, ça engendre aussi quelque part certains soucis.


Q: C'est vrai qu'il y a beaucoup de gens qui viennent de l'extérieur pour se rendre au marché des Sablons, c'est parfois le seul endroit où ils viennent, mais ça permet quand même de faire venir les gens ici et de faire évoluer l'image...

Beaucoup de gens viennent sur le marché. On voit des dames qui prennnent le bus, le tram et qui viennent au marché des Sablons. Je trouve que c'est l'un des meilleurs marché sur le Mans !

Q :  Pour les Manceaux, les Sablons, ça évoque souvent des problèmes de délinquance, des incivilités... À quel point ça gêne la vie des habitants ?

Dans certains coins, ça gêne beaucoup les gens. On a vu  des gens partir des Sablons, parce que tout simplement, il y a des incivilités, un peu de violences, des menaces, des jeunes qui sont là désoeuvrés, qui se mettent dans un coin, et qui font des choses qu'il ne faut pas, donc il y a des gens qui préfèrent vraiment partir.  Nous dans le cadre de notre travail, en tant qu'habitant de ce quartier, on essaye de faire en sorte que cela cesse. Il y a des problèmes partout, les problèmes peuvent se déplacer, aujourd'hui on nous parle des problèmes qu'il y en coeur de ville.  Donc il faut essayer de se réunir, ensemble, et de travailler à la modération de ce quartier.  


Q: Il ya quelques mois, il y a eu une petite étincelle aux Sablons suite aux tirs sur la mosquée, les jeunes musulmans se sont sentis agréssés. Vous êtes vous-même musulmane... tout ça est derrière nous ? Ou est-ce qu' il y a encore un sentiment d'être laissé de côté pour les musulmans des Sablons ?


 De susciter la peur plutôt. Parce qu' avec tout ce qui se passe, quand on dit qu'on est musulman, tout de suite les gens se braquent. Alors qu'en fait, la religion musulmane, ce n'est pas du tout ça. Il existe toujours des extrémistes, des fanatiques qui vont prendre les choses bien et les transformer.  Ce sont des gens désoeuvrés qui n'ont rien à quoi se raccrocher. Ils se raccrochent à la religion mais de la mauvaise manière. Moi-même je suis musulmane, et ça ne m'empêche d'aller travailler.  Je vis ma foi chez moi, je ne l' impose pas aux gens. Je vis dans une société qui est laïque.  

"L'accès aux droits c'est important,

les devoirs aussi "

_______________

"Il faut, ensemble travailler à la modération

de ce quartier "

_______________